[Tutoriel] Installation manuelle de GCC (et du fxSDK)
Posté le 31/05/2014 17:02
Parmi les compilateurs C/C++ modernes de premier plan (LLVM, GCC, MSVC...), GCC est le seul à avoir un backend SuperH, ie. capable de générer des add-ins pour les calculatrices CASIO. Dans ce tutoriel, on va voir comment compiler GCC à la main. J'y mentionne également par le symbole
les étapes supplémentaires nécessaires pour installer le fxSDK tout entier à la main.
Ce tutoriel était initialement utilisé pour toutes les installation de GCC pour la calculatrice, mais il y a maintenant des méthodes automatiques via le dépôt
sh-elf-gcc, via
MiddleArch ou même l'installation complète du fxSDK avec
GiteaPC. Le texte ci-dessous est donc destiné à des personnes relativement expérimentées avec le terminal et les processus classiques de compilation, et spécifiquement à ceux qui voudraient tester des configurations inhabituelles.
Pour relire l'ancien tutoriel, voir sur la forge Gitea.
Ce tutoriel est écrit pour Linux mais vous pouvez le suivre sous Windows 10 en utilisant
WSL qui vous donnera accès à Ubuntu.
1. Présentation du processus
Dans ce tutoriel, on va compiler plusieurs logiciels. Côté compilateur, d'abord
binutils, une suite de programmes qui gère l'assembleur, les fichiers objets, les bibliothèques, et l'édition des liens ; puis
GCC, le compilateur C/C++ en lui-même.
Ensuite on va faire un détour par le fxSDK pour installer la bibliothèque mathématique et la bibliothèque standard C qui sont nécessaires pour avoir accès à la totalité du langage C.
On reviendra alors vers GCC, puisqu'une fois la lib standard C installée on peut compiler la bibliothèque standard C++, qui est là aussi nécessaire pour avoir accès à la totalité du langage C++.
Enfin on pourra finir l'installation du fxSDK avec gint et d'autres bibliothèques.
[fxSDK] Commencez par installer le dépôt
fxsdk, qui fournit la sysroot dans laquelle on va installer le compilateur. C'est un
cmake/
make classique.
2. Installation des dépendances
Nos calculatrices utilisent des processeurs de la famille SuperH, on ne peut donc pas utiliser le même compilateur C que quand on programme pour l'ordinateur. On va utiliser un
cross-compilateur qui ne s'appelera pas
gcc mais
sh-elf-gcc, attention à ne pas confondre !
Téléchargez la dernière version de binutils (
téléchargement ici) ainsi que la dernière version de GCC (
téléchargement ici). En cas d'erreur insondable, vous pourrez toujours tenter d'autres versions plus tard.
Attention : Si votre GCC système est en version 12.1 ou 12.2 (tapez
gcc -v pour le déterminer), vous devez prendre GCC 11.1 pour la calculatrice à cause de
ce bug de GCC pour x86_64.
Bien sûr GCC est un logiciel complexe avec pas mal de dépendances. Voici de quoi les installer :
# Pour Debian, Ubuntu, Mint, WSL pour Windows, et autres dérivés de Debian :
% sudo apt install libmpfr-dev libmpc-dev libgmp-dev libpng-dev libppl-dev flex g++ git texinfo
# Pour Arch Linux, Manjaro, et autres dérivés de Arch :
% sudo pacman -S mpfr libmpc gmp libpng ppl flex gcc git texinfo
- MPFR : calcul flottant à précision arbitraire
- MPC : calcul complexe à précision arbitraire
- GMP : arithmétique entière multi-précision
- libPNG : manipulations d'images PNG
- PPL : optimisation polyhédrique (optimisation magique)
- flex : générateur d'analyseurs lexicaux
- g++ : compilateur C++ pour votre système
- git : gestionnaire de versions
- texinfo : générateur de documentation formatée
3. Préparation de l'environnement de compilation
Le compilateur et toutes les bibliothèques pour la calculatrice vont être installées dans un même dossier. Si vous utilisez le fxSDK, ce dossier est pré-choisi et la commande
fxsdk path sysroot vous l'affiche. Sinon vous pouvez aller où vous voulez, mais restez dans votre dossier personnel.
% export PREFIX="$(fxsdk path sysroot)"
# Exemple de dossier hors fxSDK :
# export PREFIX="$HOME/opt/sh-elf-2.39-11.1.0"
% mkdir -p $PREFIX
Assurez-vous que
$PREFIX/bin est dans votre PATH. Extrayez le contenu des archives que vous avez téléchargées dans un dossier temporaire, et créez deux répertoires
build-binutils et
build-gcc.
% tar -xJf binutils-2.39.tar.xz
% tar -xJf gcc-11.1.0.tar.xz
% mkdir build-binutils build-gcc
On va ensuite appliquer quelques patchs. On va d'abord toucher un fichier de binutils pour éviter la régénération d'un parser avec bison qui ne marche plus depuis longtemps :
% touch binutils-2.39/intl/plural.c
Si vous utilisez GCC 11.1 (et sans doute quelques versions d'avant), téléchargez de plus
ce patch qui désactive des tests de configuration inutilement aggressifs dans la lib C++ et appliquez-le :
% patch -u -N -p0 < gcc-11.1.0-libstdc++-v3-skip-dlopen.patch
4. Compilation de binutils
La compilation de binutils est un configure/make classique. Les options qu'on utilise sont :
- --prefix pour indiquer le dossier d'installation final.
- --target="sh3eb-elf" pour spécifier qu'on veut un cross-compilateur pour SuperH.
- --with-multilib-list="m3,m4-nofpu" indique plus précisément qu'on veut une variante pour SH3 et une pour SH4 sans FPU.
- --program-prefix="sh-elf-" renomme le compilateur de sh3eb-elf-gcc à sh-elf-gcc vu qu'on a aussi le SH3.
Il n'y a pas beaucoup d'autres options intéressantes, mais vous pouvez les voir toutes avec
configure --help.
% cd build-binutils
% ../binutils-2.39/configure --prefix="$PREFIX" --target="sh3eb-elf" --with-multilib-list="m3,m4-nofpu" --program-prefix="sh-elf-"
Une fois que tout est configuré, il n'y a plus qu'à compiler et à installer. Normalement ça va assez vite, comptez quelques minutes.
% make -j4
% make install-strip
Les exécutables de
binutils ont dû apparaître dans
$PREFIX/bin Essayez
sh-elf-ld --version qui doit vous renvoyer la version de binutils (ici 2.39).
5. Compilation de gcc et de libgcc
Ensuite c'est pareil mais pour GCC. En plus des options précédentes, on indique :
- --enable-languages="c,c++" qui spécifie les compilateurs qu'on veut. Si vous voulez expérimenter avec d'autres langages notamment Ada, D, Go ou Fortran, c'est là qu'il faut commencer !
- --without-headers qui indique essentiellement qu'on veut un cross-compilateur.
- --enable-clocale="generic" qui simplifie le module <locale> de la lib C++.
- --enable-libstdcxx-allocator qui fait de même avec les allocateurs mémoire.
- --disable-threads qui désactive le threading (qu'on n'a pas).
- --disable-libstdcxx-verbose qui élimine des logs dans la lib C++.
- --enable-cxx-flags="-fno-exceptions" qui désactive les exceptions durant la compilation de la lib C++.
Voyez
le guide de configuration pour toutes les options utiles.
% cd "$PREFIX/build-gcc"
% ../gcc-11.1.0/configure --prefix="$PREFIX" --target="sh3eb-elf" --with-multilib-list="m3,m4-nofpu" --enable-languages="c,c++" --without-headers --program-prefix="sh-elf-" --enable-clocale="generic" --enable-libstdcxx-allocator --disable-threads --disable-libstdcxx-verbose --enable-cxx-flags="-fno-exceptions
Cette fois la compilation occupera entre 10 et 30 minutes... ou 5/6 heures sur un vieux Raspberry Pi.
% make -j4 all-gcc all-target-libgcc
% make install-strip-gcc install-strip-target-libgcc
Avec ça vous devez pouvoir taper
sh-elf-gcc -v et la version et les options de compilation.
[fxSDK] C'est le moment d'installer
OpenLibm, avec
make.
[fxSDK] Installez aussi la lib C,
fxlibc, un autre
cmake/
make classique.
6. Compilation de libstdc++
On peut maintenant revenir dans le dossier de compilation de GCC et compiler des libs plus évoluées, comme la lib C++. Si vous testez d'autres langages (par exemple D) c'est le moment de compiler les libs qui vont avec (libphobos), ou même de compiler libssl, libiberty, etc. selon vos goûts.
% make -j4 all-target-libstdc++-v3
% make install-strip-target-libstdc++-v3
Et voilà, la toolchain est complète. Si vous manquez d'espace disque vous pouvez supprimez les archives, dossiers de sources, et dossiers de build de binutils et GCC.
Vous pouvez aussi installer
gdb dans la même veine que binutils pour pouvoir debugger les add-ins à distance.
[fxSDK] Installez maintenant
gint, et les autres libs qui vous plaisent (eg. libprof, zlib, etc).
Et voilà, vous avez un compilateur C/C++ complet voire un SDK complet pour programmer des add-ins.
Fichier joint
Citer : Posté le 08/06/2014 13:37 | #
Compiler sur Android ? À moins que l'on puisse compiler gcc sur Android, je ne vois pas trop comment...
Ajouté le 08/06/2014 à 14:01 :
Tutoriel terminé !
Citer : Posté le 08/06/2014 14:08 | #
Avec l'application CCTools, il y a un add-on GCC, qui permet de justement de compiler du C, donc je me demande si il y aurait un moyen
Citer : Posté le 08/06/2014 14:19 | #
Oui, mais ça doit être un gcc compilé pour Android ?
Citer : Posté le 08/06/2014 14:30 | #
Oui surement
Citer : Posté le 08/06/2014 14:33 | #
Ah... peut-être.
Peut-être que tu pourrais compiler un gcc pour la calto en utilisant le gcc présent sur l'Android. Mais il faut aussi le make...
Citer : Posté le 08/06/2014 15:42 | #
Mais je me pose des questions sur la compatibilité sh4... Est-ce qu'on aura encore besoin du code de compatibilité ou d'une toolchain sh4eb-elf ?
Coïncidence ? Je ne pense pas.
Citer : Posté le 08/06/2014 15:50 | #
Il faut faire la différence entre la question de la spécificité de la machine et de l'architecture SH4. Au niveau de l'architecture il ne devrait pas y avoir de soucis : on compile avec cette toolchain pour la Prizm, qui a un SH4.
C'est au niveau de la machine que se trouve le "problème" : changement d'adresse de certains registres/mémoires par exemple, et ça, GCC n'en a que faire car c'est "nous" (ou la lib de casio) qui utilisont ces adresses, lui compile simplement du code compréhensible par tout les processeurs SH3 en fonction de ce qu'on lui donne. D'ailleurs on remarquera qu'un code compilé avec le sdk de Casio (à la base pour sh3 donc) est parfaitement exécutable en tant que suite d'instruction sur une calculette SH4 (ensuite si ces instructions "essayent" de lire dans un registre processeur / une mémoire qui n'existe plus, c'est un autre problème).
Compiler avec une toolchain SH4 ne résoudra pas le problème (du moins je pense bien). C'est donc dans du "code de compatibilité" qu'il va falloir "taper".
Citer : Posté le 10/06/2014 10:20 | #
Je viens de finaliser le tuto. Quelques fautes d'orthographe, grammaire et syntaxe corrigées et un sommaire ajouté.
Le tout en 10 étapes.
Citer : Posté le 10/06/2014 10:47 | # | Fichier joint
Si tu veux Eiyeron, je regarderai ce soir si il y a moyen de récupérer les binaires du PrizmSDK (Je pense que oui perso) ;).
Et pour Florian66, le cross compilateur te permet de compiler des programmes destinés à être exécutés sur une certaine architecture (ici SuperH) à partir d'une machine basée sur un autre architecture (ton PC en l'occurrence, donc du x86 je suppose). En gros c'est : faire des addins sans utiliser le SDK de Casio.
Bump, alors, ça avance l'idée? Je suis pas très chaud, j'ai l'impression que l'on compile d'une arch pour une autre arch. Si tu veux j'ai déjà bricolé des ficheirs de règles à partir du PrizmSDK.
Citer : Posté le 14/06/2014 11:18 | #
Lephénix, tu avais fait un makefile non ? Tu pourrais le partager que je vois à quoi il ressemble (je suis un néophyte en matière de makefile) ?
Citer : Posté le 14/06/2014 11:32 | #
Je l'ajouterai au tuto plus tard.
Citer : Posté le 14/06/2014 22:30 | # | Fichier joint
Bref, voici une archive zip contenant un projet "par défaut" :
Tout les fichiers sont dedans :
Dans "bin" :
-> addin.ld
-> ctr0.s
-> g1a_header.h
-> g1awrapper (attention à remplacer le g1awrapper par le votre, celui donné ici peut être incompatible avec votre distribution)
Dans "include" :
-> Les header de fxlib
A la racine :
-> fxlib.a (la librairie fxlib compatible GCC)
-> icon.bmp (l'icone de votre programme)
-> main.c (le fichier "par défaut")
-> addin.g1a (l'exemple de l'addin par défaut)
-> Makefile (un makefile fait par LePhenixNoir et moi-même)
Utilisation du makefile :
Placez vous à la racine du projet dans le terminal puis :
Modifiez la ligne "NAME = addin" par le nom de l'addin à créer. De même, modifiez les premières lignes pour choisir votre compilo et g1awrapper.
La ligne "SRC = $(wildcard *.c)" correspond aux fichiers qui seront compilés. Par défaut tous le sont. Pour faire une liste précise, remplacez par "SRC = main.c fichier1.c fichier2.c)". Le reste se fait automatiquement.
Une fois que ce fichier a été configuré, quittez Nano en enregistrant, puis vous pouvez utiliser :
Citer : Posté le 15/06/2014 10:58 | #
Génial, merci.
Je commence à penser qu'il faudra vraiment qu'on fasse un fxSDK pour Linux, ça serait tellement plus pratique...
Quoique la ligne de commande, j'aime bien aussi
Citer : Posté le 27/06/2014 14:04 | #
J'ai fait un peu de recherche sur les options de GCC et j'ai trouvé cette page qui les recense.
Il y en a quelques-unes qui pourraient nous être utiles notamment
--with-endian=big [green]//pour ne pas taper -mb à chaque fois[/green]
Ainsi que toutes les options listées dans "Cross-Compiler-Specific Options"
Dont, par exemple
--with-libs="dir1 dir2 ... dirN"
Ou carrément
Je regarde ça et je vous tiens au courant !
Coïncidence ? Je ne pense pas.
Citer : Posté le 27/06/2014 14:04 | #
C'est à la compilation de gcc ces options ?
Citer : Posté le 27/06/2014 14:05 | #
Oui
Coïncidence ? Je ne pense pas.
Citer : Posté le 27/06/2014 14:06 | #
Le problème, c'est que du coup ces options sont permanentes...
Citer : Posté le 27/06/2014 14:07 | #
je ne pense pas : on peut toujours spécifier -nostdlib à la compil par exemple
Coïncidence ? Je ne pense pas.
Citer : Posté le 27/06/2014 14:09 | #
Oui mais on ne pourra pas annuler les options ajoutées à la compilation, c'est un peu le problème... si on venait à utiliser un compilateur SH4, on ne pourrait pas sans recompiler gcc.
De plus, comme on utilise un Makefile... mais bon, ça peut rester utile quand même.
Citer : Posté le 27/06/2014 14:12 | #
Ben recompiler gcc, c'est pas la mer à boire, j'ai déjà deux cross-gcc... (une sh3-elf et une sh4-elf)
enfin pas pour tout le monde...
(j'aurais mieux fait de me taire...)
Coïncidence ? Je ne pense pas.
Citer : Posté le 27/06/2014 14:13 | #
Oui, c'est vrai que DS a eu du mal
Non mais c'est pratique. Je le rajouterai au tuto.